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Comment préserver les savoirs dans sa boîte ?

Dernière mise à jour : 18 nov.


Avec Anne Clotteau, CEO et fondatrice de Thank you & Welcome


Anne Clotteau, CEO et fondatrice de Thank you & Welcome, nous explique l'importance de préserver tous les savoirs acquis au sein de l'entreprise
Anne Clotteau, CEO et fondatrice de Thank you & Welcome



Comment préserver les savoirs dans sa boîte ?

Comment transmettre les compétences et les savoirs en entreprise pour en faire une valeur en tant que telle ?


Anne Clotteau est la CEO et fondatrice de Thank you & Welcome, une plateforme digitale dédiée à la transmission des savoirs et à la valorisation des expériences. Professionnelle des ressources humaines, elle a occupé des postes stratégiques dans des groupes internationaux tels que L’Oréal, Bacardi Martini et Coty.


Mais depuis 6 ans, Anne a décidé de se concentrer sur un sujet qui lui tient à cœur : la préservation des savoirs, leur transmission, et la valorisation des contributions et des compétences de chacun.


C’est une question vraiment importante, car c'est un enjeu souvent négligé par les entreprises. Vous vous êtes déjà probablement retrouvés dans une situation où il y a un coup dur pour l'équipe, quelqu'un part et on perd une ressource-clé qu’il va falloir remplacer… Mais comment gérer sans elle, comment faire pour ne pas perdre ses savoirs ?


Pérenniser la transmission des savoirs au sein de votre organisation passe principalement par un état d’esprit, une culture de la transmission. Et si vous ne le faites pas encore, ne vous inquiétez pas, on peut mettre en place des actions et des bonnes pratiques pour développer cela. Anne est là aujourd’hui pour nous dévoiler tout cela !


LES IMPACTS D’UN MANQUE DE TRANSMISSION DES SAVOIRS


Le manque de transmission des savoirs en entreprise n’est pas anodin, il peut même avoir des impacts majeurs, directs ou indirects, sur son organisation et sa compétitivité. Anne en a répertorié 6 principaux :


  1. La perte d'efficacité opérationnelle


Lorsqu’une organisation perd les compétences accumulées au fil du temps, elle va avoir des difficultés à maintenir l'efficacité opérationnelle des équipes, et donc se retrouver confrontée à une baisse de productivité.


En effet, si les bonnes pratiques, les procédures et les processus n’ont pas été transmis, cela peut engendrer :

  • des erreurs répétées,

  • des duplications d’efforts,

  • de la fatigue,

  • de l’inefficacité,

  • une intégration plus difficile des nouvelles recrues, ce qui va augmenter le temps nécessaire pour qu'elles deviennent productives, etc.


  1. Une érosion de la culture d'entreprise et un affaiblissement du sentiment d’appartenance


Le deuxième impact est plutôt lié à la culture, puisqu’on va avoir une érosion des facteurs d'identité et de la culture d'entreprise. C'est particulièrement vrai quand la personne qui s’en va était un pilier, une figure-clé de l’organisation. Non seulement elle emporte avec elle son savoir-faire, mais aussi son influence sur l’identité collective : ses anecdotes, ses expressions… Bref, on perd un bout de l'histoire.


Le danger, c’est qu’à la suite de ce départ, le sentiment d'appartenance se retrouve affaibli, ce qui peut faire peser des risques d'augmentation du turnover. Si la transition n’a pas été bien faite, ça peut être l’effet domino : effectivement… Si lui est parti, pourquoi pas moi ? Je l’appréciais, c’était quelqu’un de bien, pourquoi est-il parti ? Pourquoi moi, je ne réfléchirais pas au fait que je parte ?


Ce phénomène peut déstabiliser profondément la culture de l'entreprise, surtout quand celle-ci est forte. Cela peut même casser le collectif, qu’on retrouve dans la verbalisation où on passe du "nous" collectif à un "je" individualiste.


  1. Un frein à l'innovation


Quand on transmet des savoirs, on ne se limite pas au passé ni au présent (au projet du moment par exemple), mais on inclut aussi le futur, c’est-à-dire l'évolution et la manière dont on adapte ses pratiques en fonction des nouvelles connaissances. La transmission, ce n’est donc pas seulement passer un savoir technique, mais aussi des idées pour le futur. 


Sans cela, l’entreprise peut manquer d'innovation et d'adaptation face aux futurs défis, et aussi face à ce que peut faire la concurrence.


D’où l’intérêt aussi d’interroger le collaborateur qui part sur ce qu’il envisageait pour l'avenir : si tu avais une baguette magique, pour le futur tu mettrais quoi en place ? Là finalement, on pose sur la table l'adaptation et la créativité  - qui n’est pas encore innovation - mais que la personne aurait aimé mettre en place. Elle ne l’a pas fait pour plein de raisons possibles (manque de temps, d'argent, de sponsors…), mais le fait d'aller chercher ce futur dans la tête des gens qui partent, peut permettre une innovation, mais aussi une adaptation plus rapide pour des personnes qui arrivent et qui ne connaîtraient pas l'organisation. Et c’est source de potentiel, on peut potentiellement déterrer des pépites d’idées non réalisées qui peuvent transformer l’avenir de l'entreprise.


  1. Une vulnérabilité plus grande en cas de crise


Le changement est une constante en entreprise. Ceux qui ont accumulé de l’expérience, qui ont déjà traversé des périodes de changement, sont des exemples pour les autres : ils montrent en effet que non seulement que l’adaptation est possible, que les crises peuvent être surmontées, mais que le changement peut être géré sereinement. Ce sont donc des éléments de résilience extrêmement forts.


Si ces personnes partent, et que la transmission n’a pas été bien faite - ou pas du tout - l’entreprise risque donc, face à une crise, d’être plus vulnérable, plus rigide… bref plus en mode panique !


  1. Une fragmentation sociale


La transmission se fait toujours d'une génération généralement expérimentée vers ceux qui le sont moins. Là on ne parle pas forcément uniquement d’expérience technique, mais aussi de la connaissance de la culture de l'organisation, des clients, des process internes, de tout ce qui peut relever de l’informel - ces petites astuces, ces "pratiques ingénieuses" qui rendent le quotidien plus fluide et agréable.


Sans cette transmission, on peut donc se retrouver avec a une fragmentation sociale qui se crée entre ceux qui savent et ceux qui apprennent, ce qui affecte la cohésion interne


  1. Une frustration des collaborateurs


Et enfin, dernier impact : il y a ceux qui voudraient transmettre mais qui sont frustrés parce qu'on ne leur donne pas le temps, les moyens, les ressources de bien tourner la page. Ce manque de reconnaissance, combiné à l'incapacité de passer le relais correctement, laisse souvent un goût d’inachevé, et prive l'organisation d'une continuité sereine.


POURQUOI CE MANQUE DE TRANSMISSION ?


On l’a vu, les impacts vont bien au-delà du simple : “Ah zut, Ludovic est parti et les documents dont on a besoin sont sur son PC”… Cela peut aller jusqu’à rompre une certaine continuité dans la vie de l’entreprise.


Mais pourquoi est-on généralement assez mauvais en France dans cette transmission des savoirs ? Anne y voir plusieurs raisons possibles :


  1. Certaines entreprises favorisent l’individuel, la compétition


D'abord, certaines entreprises ne valorisent tout simplement pas cette transmission, elles ont une culture qui privilégie plutôt la compétition individuelle et le leadership personnel. De fait, dans ces environnements, la collaboration et le partage de connaissances sont souvent relégués au second plan.


Par exemple, chez Uber à ses débuts, la culture du "Hustle" dominait, c'est-à-dire que la compétition pour l'innovation, le travail acharné et la réussite personnelle étaient largement encouragés. C’était des environnements de productivité intensive, avec de longues journées, avec une pression pour atteindre des objectifs, avec beaucoup de compétitivité. Certes, les tâches étaient réalisées rapidement avec des succès rapides, mais au prix d’un épuisement professionnel et d’un manque de collaboration.


Autre exemple chez Tesla, où malgré une mission commune ambitieuse, les équipes travaillent souvent en silo et chacun se retrouve donc en quelque sorte dans son “couloir de nage”. Ce type d’organisation demande énormément d'énergie aux équipes en local lorsqu'elles veulent s'organiser à des fins de collaboration. Dès qu'il y a des silos, il faut donc trouver des alternatives, des artefacts, des rituels, des process pour mieux travailler la transmission.


  1. Une culture de l’écrit insuffisante en France


En France, la culture orale domine encore dans de nombreuses entreprises, elles n’ont pas le réflexe de l’écrit, contrairement aux pays anglo-saxons où la culture de l’écrit est beaucoup plus ancrée. Et quand tout est documenté, forcément, c’est beaucoup plus facilement transmissible !


Ce manque de formalisation des connaissances rend donc la transmission assez aléatoire… Donc prenez l’habitude de plus en plus documenter toute la vie de l’entreprise ! Et bonus, en plus de faciliter la transmission des savoirs, vous allez acquérir un autre super pouvoir : celui d’intégrer beaucoup plus facilement l’IA dans votre entreprise, puisque celle-ci va se nourrir de votre data.


  1. Des savoirs parfois tacites plus difficiles à transmettre


Ceci étant dit, même dans les boîtes qui sont des championnes de la documentation (comme Alan, Theodo ou Captain Contrat), ce n’est pas encore suffisant. Pourquoi ? Parce qu'ils ne sont pas très forts dans l'explicite (c’est-à-dire les connaissances qu'on peut écrire), mais ils ne vont pas vraiment travailler le tacite.


Et certaines connaissances à transmettre ne sont pas de l'ordre de procédures ou d'écrits qu'on peut faire, mais sont plutôt liées au relationnel et au cognitif - ce qui est plus délicat à transmettre.


Dans ce cas, pour une bonne transmission de ces savoirs qui ne sont pas procéduriers, il faut savoir poser les bonnes questions aux gens qui partent (on développera ce point ci-après).


COMMENT AMÉLIORER LA TRANSMISSION ? MODE CURATIF


On va classer les recommandations et les bonnes pratiques selon qu’on se trouve en situation d’urgence (Exemple vécu chez Yaniro : Ludovic part dans 2 mois et demi, c’est un grand sachant, qu'est-ce qu’on fait ???) ou non (mode préventif = créer une culture de la transmission). Commençons par les situations d’urgence où il faut faire le pompier, le mode curatif :


  1. Identifier le degré de sensibilité du poste à la transmission


Lorsque le temps est compté, la première action est de prioriser. Dans cette situation, la clé réside dans l'identification du degré de sensibilité du poste concerné, c'est-à-dire, évaluer à quel point le poste et les responsabilités de la personne qui part sont importants pour l'entreprise (et donc quel est le degré d’urgence à travailler la transmission).


Pour cela, Anne recommande l'utilisation du modèle VRIO : 


  • V pour Valeur : Évaluer à quel point la personne apporte de la valeur à l'entreprise, et plus globalement au marché : est-ce qu'elle a des compétences ou même des ressources qui sont très valorisantes, est-ce que cela contribue à de la valeur directe pour les clients, etc.

  • R pour Rareté : Se questionner sur la difficulté de remplacer ces compétences, en d'autres termes : est-ce qu'il va être difficile de recruter, ou est-ce que ça va être très coûteux ? Dans la tech, on le sait, certains profils sont très difficiles à recruter (les technologies spatiales, les énergies renouvelables avancées, la blockchain, le web 3…). A contrario, certaines compétences sont partagées par plein d'acteurs sur le marché : un responsable marketing, un directeur de la communication, ce n'est pas rare.

  • I pour Imitable : Est-ce facile et rapide de remplacer ou de reproduire les compétences, les ressources ou les avantages apportés par la personne qui part ? Si on a un super prestataire qui est capable de prendre le relais en l'espace de 3 jours, c'est bon, on n'est pas à risque. Mais dans certains cas, il est difficile d’imiter certaines compétences car elles ne sont pas formalisées, ou alors elles sont hyper interconnectées. Par exemple, un collaborateur peut avoir un réseau exclusif de clients clés et historiques de la structure, ou de partenaires stratégiques. Là, c’est difficile à reproduire.

  • O pour Organisation : Comment l'équipe dirigeante peut-elle capitaliser sur son organisation pour installer tout ce qu’il faut - même un peu tard - pour que la transmission se fasse de façon fluide. Donc là on parle d’une bonne gouvernance organisationnelle, c’est-à-dire exploiter ses ressources au mieux, y compris dans les systèmes d'information, dans la nature des objectifs qui sont fixés, dans le mode de prise de décision, etc.


En fonction de ce diagnostic, si le degré de sensibilité est fort et donc que le poste est jugé très sensible, des actions doivent être mises en place pour transférer au mieux les compétences. C’est ce qu’on va voir ci-après.


  1. Questionner les parties prenantes de la relation pro de la personne qui part


Bien sûr, il faut demander à la personne qui part de transmettre. Mais on oublie souvent d’aller aussi questionner les parties prenantes de la relation pro de cette personne (son équipe, les parties prenantes internes, ses collègues transverses, son manager, mais cela peut être aussi un prestataire ou un client stratégique). Et pourtant, c’est primordial.


En effet, eux savent de quoi ils vont avoir besoin, ce qui va leur manquer… Et même, ce serait intéressant de savoir : qu'est-ce qui leur ferait prendre la décision de partir ? Parce que potentiellement, ça peut être l'enfer pour eux suite à ce départ…


Si on ne leur pose pas la question, on n'ira pas jusqu'au bout de ce qui pourrait être transmis. En plus, on valorisera beaucoup moins la contribution et le côté un peu utile de ce que la personne pourrait transmettre.


  1. Impliquer les bons acteurs dans la transmission


Dans les situations où la transmission est urgente, qui impliquer sur ces process curatifs ?


  • Les RH : ils jouent un rôle central en tant que process owners, car ils vont pouvoir déterminer si le remplacement sera long, difficile, et coûteux.


  • Les managers : la vraie richesse des informations, ce sont les managers qui la détiennent, puisque ce sont eux qui connaissent le mieux la personne qui s’en va. Normalement, ils sont capables d’évaluer les points forts à transmettre, les risques, mais aussi parfois les opportunités cachées derrière ce départ (car oui, un départ peut être l’occasion de réinventer des modes de fonctionnement). Donc le manager est systématiquement impliqué.


  • Les collaborateurs proches : comme on le disait précédemment, il ne faut pas oublier les collègues très proches, en particulier s’il y a beaucoup de transversalité dans la collaboration. Car ce sont eux qui, souvent, savent ce qui va leur manquer. Déjà c’est valorisant pour tout le monde. Ensuite, c’est là qu’on évite le fameux "trou dans la raquette" : en les intégrant dans cette transmission, on évite une énorme frustration liée à ce départ sur certains sujets, on s’assure que les responsabilités soient bien re-réparties, et que finalement, le plan de transfert soit limpide pour tout le monde.


Là, c’est plutôt au manager et aux RH de déterminer qui va être questionné, et d'envoyer ensuite un petit mail aux collaborateurs concernés pour organiser une visio, ou pour se voir en physique, avec la personne qui part. Et craquer ensemble le VRIO !


  1. Ne pas laisser la transmission reposer uniquement sur la personne qui part : il faut l’aider par des questions


Trop souvent, on laisse la personne qui s’en va gérer la transmission toute seule, un peu comme une injonction du genre : "Allez, débrouille-toi pour que tout se passe sans heurts après ton départ !" Ça peut sembler logique sur le moment, mais en fait, c’est loin d’être l’approche la plus efficace…


Déjà, on laisse la transmission au bon vouloir de la personne qui part. Certains vont bien vouloir le faire, mais d’autres non. Ensuite, même si elle est d’accord, bien souvent elle ne va pas savoir comment le faire. Généralement, la personne va se concentrer sur le présent, sur les projets en cours. C’est déjà bien, mais il y a d’autres belles questions à poser pour aller transmettre la courbe d'expérience. Elle oublie souvent de parler :

  • du passé : les décisions stratégiques, les erreurs à éviter, les anecdotes, pourquoi est-ce qu'on a pris ces décisions-là à tel moment, c'était quoi vraiment les leviers de croissance incontournables, comment est-ce qu’on a travaillé des scénarios ensemble, qu'est-ce qui n'a pas fonctionné (et si c'était à refaire, comment est-ce qu'on referait)...

  • mais aussi du futur : les idées non concrétisées, les projets en attente, les réflexions de ce que de ce qu'on pourrait faire pour avancer plus vite… Ainsi, les gens d'après ne vont pas perdre le même nombre de mois ou d'années à réacquérir cette analyse.


L’injonction, ça ne marche généralement pas bien en termes de performance… Alors comment accompagner la personne à transmettre ? La solution, c’est de lui donner du temps et l’aider à structurer, à formaliser ce qu’elle sait. Pour cela, Anne aime bien utiliser des méthodes comme le QQOQCCP en première approche (Qui / Quoi / Où / Quand / Comment / Combien / Pourquoi ?), ce qui donne ce genre de questions :

  • Qui d'autre détient le savoir ? On reprend la fiche de poste et on regarde qui d’autre détient ces compétences au sein de l'entreprise.

  • Quoi = Qu’est ce qui est à transmettre ? Sachant qu’il existe 6 types de savoirs : le savoir lié à l'environnement, le savoir procédural, le savoir expérientiel, le savoir relationnel, le savoir cognitif, et les aptitudes.

  • ce savoir est-il appliqué ? Dans quelles actions ? Et est-ce que c'est stratégique ou pas ?

  • Quand est-ce qu'on l'utilise ?

  • Comment c'est mis en œuvre ? Et quelles sont les ressources nécessaires pour toi pour transmettre, tu as besoin de quoi ?

  • Et surtout, pourquoi ? Est-ce utile, clé, ou stratégique ?

  • Si c’est utile, alors on sait que cela va permettre une continuité au quotidien ;

  • Quand c'est clé, on sait déjà que cela amène particulièrement de l'efficacité vis-à-vis des clients, vis-à-vis de l'interne ;

  • Quand c'est stratégique, ça conditionne l'avenir de l'entreprise. 


Ce genre d’approche permet d’aller chercher en profondeur, de ne pas juste se contenter de ce qui est en cours. On explore tout : les compétences techniques, les processus, mais aussi les relations qui ont été créées au fil du temps.


Ensuite, on peut continuer à poser les bonnes questions, sur 3 axes principaux :


  1. Les questions spécifiques sur les savoirs et les compétences, qu’on peut faire de façon descendante, de manière à décomposer les accomplissements de la personne :

  2. Comment tu es arrivé à ce résultat, est-ce que tu peux me décrire chaque étape de ton raisonnement ?

  3. C’est quoi les premières actions que tu entreprends lorsque tu commences cette tâche?

  4. Demander des exemples : Peux-tu me donner un exemple précis où tu as utilisé cette compétence ? Tu fais quoi dans cette situation, qu'est-ce qui s'applique ? 

  5. Les questions pour aller chercher le réflexif (où la personne va se dire : mais qu'est-ce qui vient de moi, dans ma réflexion). Le but est que la personne verbalise les critères et les processus qu’elle utilise presque instinctivement pour prendre ses décisions, résoudre des problèmes, ou structurer une démarche collaborative. Là on va pouvoir poser des questions comme (prenons l’exemple d’Alexis en tant qu’intervieweur) :

  6. Comment tu sais que c'est la bonne manière de préparer tes interviews avec nous ?

  7. Comment tu évalues la réussite de ton approche par rapport à d'autres personnes qui gèrent des podcasts ? 

  8. Et enfin, les questionnements par comparaison entre différentes expériences, différentes méthodes. Ici, le but, c’est de mettre en lumière les subtilités, les petites astuces, la "secret sauce" qui font toute la différence dans son travail. On peut demander par exemple :

  9. Pourquoi cette façon de gérer ce projet, qui a été une énorme réussite pour nous, est-elle différente de celle qui a été utilisée dans les autres projets ?

  10. Pourquoi tu as choisi cette approche cette fois-ci, pourquoi tu décides de questionner comme ça ?


C’est en questionnant ainsi qu’on arrive à récupérer toute la richesse de son expérience, et pas seulement l’aspect technique. On parle aussi du passé (qu'est-ce que tu as appris dans tout le chemin qu'on peut garder pour ne pas reproduire les mêmes erreurs) et du futur (qu'est-ce que tu avais comme intuition par rapport à la société dans le futur).


  1. Mettre en place un plan de transfert structuré


Pour arriver à une transmission fluide, la première chose à faire, c’est de responsabiliser toutes les parties prenantes : identifier celles qui détiennent les savoirs critiques, mais aussi ceux qui vont en être les bénéficiaires.


Une fois cela établi, on met en place un plan de transfert. Rien de révolutionnaire : un simple tableau Excel dans lequel on note :

  • les compétences et savoirs-clés à transférer,

  • comment on va travailler leur transfert (plein de méthodes sont possibles : réunions, mentorat, documents sur Notion, formation sur le terrain…),

  • le temps que vont prendre ces actions,

  • et le coût éventuel de ces actions.


Ensuite, lorsque la personne part, on catégorise et on note dans le tableau l’état de la transmission :


  • en vert : la compétence a été transmise

  • en orange : en cours de transfert, à poursuivre par le manager,

  • et en rouge : la compétence n’a pas été transmise, il faut trouver un moyen d’aller chercher cette compétence et la faire circuler à nouveau dans l'organisation. Par exemple, certaines entreprises font parfois revenir la personne en mission ponctuelle sur un sujet en particulier, pour pallier un des trous de la raquette.


L’idée derrière ce plan, c’est de ne pas seulement penser au contenu de la transmission, mais aussi au contenant. Il faut donc réfléchir à comment stocker et centraliser toutes ces connaissances pour qu’elles soient accessibles quand il le faut. Alan et Theodo, par exemple, ont des systèmes où toute la connaissance est centralisée. Mais pour des entreprises plus anciennes qui n’ont pas cette culture, leurs informations sont souvent éparpillées partout, la question du contenant et de la centralisation représente donc un vrai défi.


Là, on glisse vers le préventif !


COMMENT AMÉLIORER LA TRANSMISSION ? MODE PRÉVENTIF


Comme en médecine, mieux vaut prévenir que guérir. Surtout que ce sont des choses assez simples à mettre en place de base. Dans les actions préventives, il s’agit principalement de créer une culture de la transmission, bien en amont. Anne va nous livrer quelques clés pour l’instaurer :


  1. Mettre en place une gouvernance du knowledge management


Dans la plupart des organisations, un écueil majeur est l'absence de gouvernance claire sur la gestion des savoirs : personne ne s’occupe vraiment du knowledge management, il n’y a pas de poste dédié.


La base, c’est d’avoir une gouvernance sur ce sujet, ce qui passe par :

  • un sachant qui gère le processus de gestion de la connaissance : il faut donc identifier une personne, même si ça ne représente que 15 % de son job. Cette responsabilité peut être prise par de nombreuses personnes : une personne aux opérations, un manager, etc.

  • de vrais objectifs,

  • et des indicateurs mesurables de développement.


Cette gouvernance est parfois impulsée par les investisseurs : ils savent qu’il peut y avoir beaucoup de turnover dans les start-ups ou les scale-ups dans lesquelles ils injectent des millions. Ils veulent donc s’assurer que derrière, il y a vraiment une capitalisation des savoirs, une structuration de l'information qui permet d’éviter de perdre en route les savoirs critiques et les processus.


  1. Anticiper les compétences clés à transmettre


Un autre levier essentiel pour une transmission réussie est d'identifier et d’anticiper les compétences clés ou stratégiques qui doivent impérativement être transmises. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, ces compétences ne se trouvent pas toujours tout en haut de la pyramide hiérarchique. Comme le disait Maurice Lévy de Solocal, "ceux qui font savent", c’est-à-dire que ce sont ceux sur le terrain qui détiennent bien souvent les savoirs essentiels.


Et donc tout le monde doit endosser une co-responsabilité pour prendre conscience des savoirs et du besoin de structuration. Cette anticipation sera d’autant plus utile lors de fusions, d'acquisitions ou de rachats : ancrer d’abord ce qui ne doit pas disparaître, les savoirs qui fondent la continuité et la stabilité de l’organisation, avant de tout changer !


  1. Ancrer la culture de la transmission dans les rituels et les valeurs de l’entreprise


Pour que cela fonctionne, la transmission ne peut pas être uniquement un process, car tout documenter va vite ennuyer les gens... Elle doit vraiment constituer un pilier de la culture d'entreprise, le partage et la collaboration doivent faire partie intégrante des valeurs de l'organisation.


Et cela se traduit dans différents rituels de transmission. Par exemple, pour instaurer un cycle vertueux d’apprentissage et de partage, Anne propose pendant les réunions managériales de poser systématiquement cette double question :

  • Depuis la dernière fois, qu'avez-vous appris ? De qui, et pourquoi ?

  • Et qu'avez-vous transmis ? De qui, et pourquoi ?


Autre exemple, concernant les process d’onboarding et d’offboarding : généralement, les entreprises investissent beaucoup sur l'onboarding (qui est une zone d'investissement) et peu sur l'offboarding (qui est plutôt une zone de perte). Pourtant, l’offboarding est le dernier moment critique dans lequel on doit accompagner quelqu'un à transmettre, et si la transmission des savoirs n'est pas bien faite, l'onboarding ne sera jamais optimisé.


Mais pour Anne, cela devrait même être anticipé dès l'entretien de recrutement, où vous informez la nouvelle recrue que l’entreprise valorise autant l’apprentissage que la transmission : vous allez beaucoup apprendre, on va vous partager énormément de choses, mais par contre on va aussi vous demander de transmettre. Et si vous savez que la moyenne d'ancienneté est de 2 ans en moyenne dans votre structure, l'objectif c'est de leur dire : dans un an et demi, vous aurez peut-être en tête le fait d'aller ailleurs, de faire autre chose, et ce sera normal et on le comprend. Mais s'il vous plaît prévenez-nous suffisamment tôt pour qu'on puisse assurer une transition qui soit aussi agréable pour vous que pour nous


L'avantage, c’est que cela déstresse la personne sur le fait qu'elle puisse annoncer sa démission. Sachant qu’elle aura travaillé progressivement le partage de ses connaissances tout au long de sa présence, elle se sentira beaucoup plus légère d'annoncer et de vivre son départ, et de ne pas laisser la structure dans une situation délicate.


PETIT GUIDE PAS À PAS POUR COMMENCER À AMÉLIORER LA TRANSMISSION DES SAVOIRS


Si vous êtes maintenant convaincus, et que vous voulez commencer à améliorer  la transmission des savoirs dans votre entreprise, Anne vous propose ce petit guide pas à pas :


  1. Faites un état des lieux


Avant de vouloir tout révolutionner, commencez par observer ce qui existe déjà, il y a certainement des choses que vous faites en ce sens :

  • Qu'est-ce qu'on fait ? C'est quoi nos bonnes pratiques? Comment est-ce qu'on transmet à l'heure actuelle nos connaissances ? Est-ce qu'on le fait parce qu'on a des communautés d'intérêt, on a des communautés de pratiques ? A-t-on des questions spécifiques dans les réunions ? Quels outils on utilise, est-ce qu'on a un canal Teams sur lequel on partage les connaissances, est-ce que ça se fait sur Notion ? Etc…


  1. Identifiez les savoirs critiques, mais aussi les valeurs qui vous différencient


Réfléchissez aux savoirs et compétences clés qui font la force de l'organisation, mais aussi les valeurs qui vous différencient des autres et qui font que vous en êtes là à ce jour, et que vos concurrents finalement n’en sont pas exactement là. Il est très important de transmettre les valeurs autant que les process.


Pour vous aider dans ce travail, vous pouvez décomposer le capital intellectuel en 3 sphères :

  • le capital connaissances,

  • le capital outils,

  • et le capital relationnel.

Ce sont ces piliers qui structurent l’ADN de l’entreprise et doivent être transmis à tout prix. Vous pouvez vous poser la question suivante sur chacune d’entre elles, qu'est-ce qui fait qu'à l'heure actuelle, on est ce qu'on est ? 


  1. Sensibilisez les gens, instaurez des rituels


Ensuite, posez-vous la question de savoir comment faire pour que les gens soient sensibilisés assez tôt à l’importance de ces savoirs et à leur transmission. Comme évoqué précédemment dans les rituels, on peut poser quelques questions en réunion managériale, ou l’évoquer dès les entretiens de recrutement.


Autres idées : vous pouvez organiser des événements thématiques comme une “semaine de la transmission”, ou des concours internes sur les meilleures pratiques. Plein de choses peuvent être imaginées pour vraiment installer la culture de la transmission dans les habitudes de tous.


  1. Impliquez la direction


Pour que cette culture s'ancre véritablement, il faut qu’elle soit portée par le haut. Que ce soit la direction ou les membres du comité de direction, ces acteurs doivent montrer l’exemple, et donc intervenir régulièrement sur le sujet de la transmission.


  1. Identifiez les destinataires des savoirs


Demandez à chaque collaborateur d’identifier qui seraient les destinataires de leurs savoirs sur leur poste, en cas de départ. Cela peut être un collègue, un prestataire clé... Ensuite, vous pouvez formaliser tout cela dans un tableau Excel tout simple comme on l’a vu plus haut : savoir identifié, destinataire, outils à mettre en place pour la transmission, etc.


Bref, dès qu'une personne a par exemple plus de 3 à 6 mois d'expérience dans l'organisation, ça rentre dans son processus d'intégration : est-ce que vous avez déjà identifié qui seraient vos backups ?


  1. Allouer du temps pour la transmission


Ne prenez pas peur en pensant que cela va prendre beaucoup de temps ! Si chaque collaborateur ne consacre ne serait-ce que 2 heures par mois à structurer et à partager son savoir, vous allez constater hyper rapidement des impacts assez incroyables sur la performance de l'organisation, mais aussi sur la qualité de vie au travail.


  1. Si vous partez, notez les questions qu’on vous pose


Quand une personne part, donnez-lui un petit carnet et demandez-lui de noter toutes les questions qu’on lui pose régulièrement, ainsi que ses éventuelles interventions en réunion. Cela permet d’identifier rapidement ce que la personne a envie d'apporter à l'organisation, et ce pour quoi on vient la chercher régulièrement - et donc de mieux transmettre ses savoirs !


Et bien sûr, si vous avez besoin d’aide, que ce soit en curation (en urgence pour ne pas perdre quelque chose de stratégique) ou en préventif (pour aider les structures à designer leur processus qui amène finalement cette culture de la transmission), n'hésitez pas à faire appel à Anne ! 


Vous pouvez contacter Anne sur LinkedIn

Site Web de Thank you & Welcome : https://thankyouandwelcome.fr/


Ressources recommandées par Anne :


Outils en matière de transmission recommandés par Anne :

  • Notion

  • Discord

  • L’outil Obsidian qui compile tous nos savoirs sous forme de constellation, sur un seul slide


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